Le cas du magazine. Le magazine En Magnum a émergé parmi les magazines du vin avec un format intéressant qui permet une expérience complémentaire à celle du papier. Selon Nicolas de Rouyn, journaliste pour le trimestriel « En Magnum » de Bettane & Desseauve, le papier n’est pas mort et heureusement car sinon il manquerait une dimension artistique sur Internet qui passe par la mise en page des articles et des photos notamment. Par le biais de leur magazine, il est possible de mettre en perspective, de faire la part belle à tout ce qu’internet ne peut pas véhiculer, il ajoute le toucher, le grain de la photo, une odeur, un relief mais aussi la mise en valeur de la lecture avec des textes plus longs. N’imprime-t-on pas les textes qu’on veut lire attentivement ?
Comment arriver à imaginer ce que va être le futur du vin ? Selon Jean-Luc Etievent de Wine Mosaic, à l’avenir, l’homme n’aura peut-être plus à intervenir dans la création du vin car la machine pourra remplacer chaque étape du processus. Les sujets présents en 1919, année de création des AOC, sont exactement les mêmes qu’aujourd’hui avec en premier lieu la standardisation du monde du vin mais également le « faire du bon » et la création des AOCs ou encore la pression réglementaire accrue sur le monde du vin et la prohibition. Selon lui, le digital est le phyloxera des temps modernes dans le sens ou ce dernier implique des changements de comportements et l’apparition de nouveaux acteurs.
Aujourd’hui la réinterprétation de la tradition est tout à fait possible comme on le voit avec la réintroduction des vinifications en amphore qui, à l’origine, ne présentaient que l’avantage du transport, ou encore le développement de la biodiversité dans le vignoble avec la réintroduction des cépages anciens notamment. Ainsi ces réinterprétations permettent en quelques sortes de renouer avec notre tradition, de retrouver des goûts plus proches du terroir, de notre patrimoine. Les vins d’avant-hier seront peut-être les vins de demain. Cette réinterprétation se manifeste aussi sur un plan plus culturel avec l’oenotourisme notamment ou la manière de communiquer : les lecteurs ont de plus en plus envie de découvrir et sont séduits par les belles histoires qui passent notamment par la tradition.
Pour Nicolas de Rouyn pourtant, la tradition a volé en éclat, on ne fait plus les vins comme avant. Il cite à titre d’exemple, le cas des vendanges où à l’époque il fallait rentrer les raisins avant l’ouverture de la chasse, peu importe la maturité des raisins. D’ailleurs à l’époque, il fallait attendre 20 ans pour boire un vin alors que ce n’est plus le cas aujourd’hui. Des changements ont eu lieu, dépendant des changements de moeurs et de l’arrivée de la technologie, mais autant « néfastes » que bénéfiques pour le consommateur.
Les AOCs seraient donc porteuses de tradition, un « garde-fou » selon Nicolas de Rouyn car elles sont le gage d’un certain « sérieux » de la production. Celles-ci ont été créées pour mettre un terme aux mauvaises pratiques qui consistaient à mélanger des vins issus de différentes régions pour combler un vide. Aujourd’hui, la traçabilité des vins présents dans nos bouteilles est beaucoup plus sérieuse. Le problème est que les AOC imposent un cahier des charges strict qui peut représenter aujourd’hui un frein à l’innovation. Aujourd’hui certains viticulteurs qui quittent le système des AOCs ne sont pas forcément les plus mauvais bien au contraire certains sont des précurseurs. Pour Jean-Luc Etievent, beaucoup de vignerons n’ont aujourd’hui pas besoin des AOC pour vivre. L’AOC est basée au départ sur des usages loyaux et constants, la question est de savoir comment les réinterpréter aujourd’hui, les repenser. Est-ce qu’il est loyal aujourd’hui de proposer aux consommateurs un vin avec un taux de pesticides trop élevé ?
Les cépages ancestraux sont un manière de se réinterroger sur l’histoire de notre vignoble. Il y a beaucoup de néo-vignerons qui interrogent les origines, et souhaitent retrouver ce qui existait à l’époque. Mais selon Nicolas de Rouyn, il ne faut pas oublier la réalité du vignoble et pourquoi on a oublié ces cépages car ils étaient peu productifs et peu résistants. Ce dernier précise qu’un vigneron c’est aussi une entreprise qui a l’obligation d’avoir un bilan positif. Ce dernier doit donc s’en sortir et s’enrichir et il n’y a aucune honte à produire des bonnes choses en quantité. Une limite à la tradition des cépages oubliés.
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